Paris, le 12 juin 2017
Objet : conférence 2017 à l’ONU pour un traité d’interdiction des armes nucléaires
Monsieur le Président de la République,
Je vous écris au nom de l’Association Française pour le Mouvement Pugwash, branche française du mouvement international de scientifiques qui a reçu le Prix Nobel de la Paix en 1995, en reconnaissance de ses efforts pour des solutions pacifiques aux conflits mondiaux et ses alertes sur les dangers de l’arme nucléaire.
Permettez-moi tout d’abord de vous féliciter pour vos débuts impressionnants sur la scène internationale, où vous avez montré que la France peut affirmer des opinions différentes de celles des Etats-Unis et de la Russie.
Il est par contre un sujet sur lequel la position de la France, alignée sur celle des Etats-Unis et de la Russie, fâche de nombreux pays : il s’agit des armes nucléaires.
Du 15 juin au 7 juillet prochains, l’ONU va abriter à New York des négociations qui marqueront l’histoire, visant à rédiger un traité d’interdiction des armes nucléaires, dans la lignée des traités d’interdiction d’autres armes de destruction massive, les armes chimiques et biologiques. Lors de la phase précédente des négociations, en mars 2017, 132 pays étaient présents mais pas la France, ni les Etats-Unis, ni la Russie.
Lors de votre campagne électorale vous avez insisté sur l’importance du dialogue. Pourquoi refuser à ces pays un dialogue qu’ils demandent ? Si la majorité des pays de notre planète, y compris certains de nos alliés et amis, demandent un nouveau traité complétant le Traité de non-prolifération (TNP), c’est parce que celui-ci a montré ses limites et qu’il doit être renforcé. Ce n’est pas en pratiquant la politique de la chaise vide que la France va aider à répondre aux inquiétudes de la majorité des pays du monde, ni agir pour une plus grande sécurité mondiale. Par ailleurs, toute critique ultérieure et demande de révision du traité d’interdiction qui va voir le jour ne seront pas crédibles de la part d’un pays qui n’aurait pas participé à son élaboration.
La France doit assumer son rôle moteur dans la diplomatie internationale, et il nous semble important qu’elle participe aux négociations qui s’ouvrent à New York. Il s’agit de franchir un pas décisif dans la mise en œuvre du Manifeste de Russel-Einstein (1955) qui motiva la création du Mouvement Pugwash. Les membres de sa branche française, professeurs ou chercheurs, sont à votre entière disposition pour dialoguer à ce sujet.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de mon profond respect.
Annick Suzor-Weiner, Professeur des Universités
Présidente de l’Association Pugwash-France